« No brain, no pain* » Yuurrrgen, entraineur officiel de Sébastien Chaigneau.
* : Pas de cerveau, pas de bobo.
C'est donc en mode décérébré permanent que nos P'tits Moteurs engagés sur le golfe du Morbihan ont couru leurs épreuves respectives.
Laure sur la Ronde des Douaniers, nouveau tracé de 36 km, Christophe et Maxime sur le Raid de 87 km et Jean-Michel, Franck et Bertrand sur le Grand Raid, le tour complet du golfe, soit 177 km.
Départ à 17h00 le vendredi après-midi pour le Grand Raid, avec une météo plutôt clémente, voire même beau temps, au regard de la suite du week-end. Un grand moment d’émotion nous étreint au moment du passage de l’arche de départ. 177 km, un dossard jaune. L’an dernier, nous encouragions tous ces coureurs, en nous jurant de ne pas le faire. Et pourtant nous nous sommes inscrits. Masochisme ? Envie de repousser nos propres limites physiques et mentales ? Ou tout simplement envie de partager une nouvelle aventure ? Bref, maintenant il faut avancer et essayer de ne pas flancher.
Beaucoup de monde, 902 partants, d’où une certaine bousculade sur le premier ravitaillement, qui ressemblait plus à un marché aux puces (de mer) qu’à un trail empruntant des sentiers monotraces et des digues pas assez larges pour doubler.
Marée haute, donc passage de quelques plages les pieds dans la mer, parfois jusqu’à mi-cuisse pour les plus grands.
Quelques soucis au mollet gauche pour Jean-Mi qui se fera masser à Le Bono (56 km), puis il rejoint le duo après Auray.
Ravito commun à Crac’h au 72 km, puis Bertrand lâche un peu 2 km avant Locmariaquer pour ensuite finir sa course tout seul.
Une fois la passe traversée en zodiaque, Franck et Jean-Mi profite des douches au ravito de la salle Chapron à Arzon, se changent et s’équipent pour la deuxième partie du parcours qui s’annonce humide, voire pluvieuse. Ils croisent Bertrand qui arrive juste, fidèle en fait à sa feuille de route. Il est environ 07h00 du matin. Déjà 14 heures de course pour 94 bornes. Douche également, et séance kiné.
Bertrand repart vers 08h15 et sera rattrapé par Maxime et Christophe, sur le 87 km, à Sarzeau, gros point de ravitaillement.
Franck et Jean-Mi avancent rapidement et franchissent les ravitaillements en profitant des soins kinés et ostéo afin d’anticiper toute lassitude musculaire. Bertrand de même, et arrivé à Séné, il s’offrira même un lit de camp pour y dormir pendant près d’une heure trois quarts.
Les heures s’égrènent, les kilomètres s’allongent et deviennent plus douloureux musculairement.
C’est long, très long, la pluie est incessante depuis le début de ce samedi matin, et le mental prend le relais du physique. Mettre un pied devant l’autre devient un automatisme, un réflexe. Bertrand se réfugie dans le rythme du bruit de ses bâtons qui tapent le sol à chaque foulée.
Quelques déceptions par rapport au balisage parfais un peu insuffisant, ou alors le point d’eau de St Armel qui a été supprimé. Résultat, un tronçon d’en fait 19,5 km jusqu’à Noyalo.
Ce qui est incroyable, c’est le soutien permanent des coureurs sur les circuits plus courts (dossard bleu pour le 87 km, et rouge pour le 56 km), « Bravo », « C’est fantastique ce que vous êtres en train de réaliser », « Courage, le plus dur est derrière toi ». De même le public sur les bords de route « Regarde, c’est un jaune. Allez, courage, bravo… ». Parfois, au travers d’un bref échange de regard, un frisson nous parcoure. La chair de poule s’installe.
Car nous sommes passés tous les trois dans une autre dimension de la course à pied. Nous sommes maintenant dans l’ultra : l’ultra-course, l’ultra-volonté, et l’ultra-douleur parfois.
Jean-Mi ne pourra pas re-courir jusqu’au bout du parcours, à cause de ses ampoules sous la voute plantaire, et finira 1 heure environ derrière Franck. Une arrivée à la lumière du jour ce samedi soir après un peu plus de 28 heures de course.
Pourtant Yuurrrgen avait dit bien clairement, avec son accent d’Europe de l’Est : « Si tu Nok, tu niques ».
Bertrand lui prendra la décision de dormir, car avancer à 2.5 km / heure, ce n’est plus intéressant. Et s’enfoncera dans sa seconde nuit, piles neuves dans la frontale, pour une arrivée vers 03h30 du matin, le dimanche, après 33 heures et 12 minutes de course.
Coup de téléphone à Laure et Maxime qui viendront le chercher sur la ligne d’arrivée pour le conduire à l’hôtel. En plein milieu d’une nuit qui se voulait réparatrice, car eux aussi ont forcé. Merci les jeunes, vraiment réconfortant.